Roundup en France : autorisé ou interdit ? Explications et réglementations

Un bidon oublié dans la pénombre d’une grange peut suffire à rallumer les débats les plus enflammés : Roundup, le nom claque comme une provocation. D’un côté, des utilisateurs qui s’y accrochent, convaincus de sa nécessité pour sauver leurs récoltes. De l’autre, des voix qui s’élèvent, inquiètes des effets invisibles, prêtes à en découdre au nom de la santé publique. Autour de ce désherbant, la France hésite, tergiverse, ajuste, sans jamais trancher franchement.

Entre décisions européennes, annonces retentissantes et rebondissements politiques, la ligne entre autorisation et interdiction du Roundup semble aussi incertaine que les herbes folles qu’il promet de faire disparaître. Où se situe réellement la France dans cet entrelacs réglementaire ?

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Roundup en France : où en est-on vraiment ?

Sur le terrain, la question du Roundup en France demeure une source intarissable de confusion. Les textes changent, les discours se succèdent, mais la réalité, elle, s’accroche à ses contradictions. Le glyphosate, substance phare du Roundup, fait l’objet de débats passionnés à Bruxelles, tandis qu’en France, on oscille entre restrictions et permissions provisoires. L’État a multiplié les annonces de sortie progressive, mais dans les champs, le quotidien prend souvent le pas sur les promesses politiques.

Le gouvernement avait juré en 2021 la fin du glyphosate. Mais les contraintes économiques et l’absence d’alternatives crédibles ont freiné l’ardeur réformatrice. Conséquence : pas d’interdiction totale. Seuls certains usages domestiques et quelques références commerciales ont disparu. Pour le reste, les agriculteurs jonglent avec des dérogations et des protocoles stricts.

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  • La mise sur le marché des produits à base de glyphosate reste possible, à condition d’obtenir le feu vert de l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire).
  • Depuis 2019, les particuliers n’ont plus le droit d’acheter ou d’utiliser ces produits pour leur jardin ou leur allée.
  • Les agriculteurs peuvent encore y avoir recours, mais doivent prouver qu’aucune autre solution technique n’est envisageable.

La pression réglementaire ne cesse de monter. Certaines communes instaurent des zones sans pesticides à proximité des habitations, tandis que la question écologique s’invite dans chaque texte législatif. En 2023, la France a voté contre la reconduction du glyphosate au niveau européen, mais faute de majorité, la substance reste autorisée… sous surveillance constante.

Pourquoi le débat persiste autour de l’autorisation du glyphosate

Le glyphosate ne quitte pas la scène médiatique. Depuis 2015, le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC), émanation de l’Organisation mondiale de la santé, classe la molécule parmi les « cancérogènes probables ». De l’autre côté du ring, l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) et l’Agence européenne des produits chimiques (ECHA) tempèrent, estimant, études à l’appui, que l’utilisation actuelle ne présente pas de risque avéré pour l’homme.

À chaque échéance, la tension monte d’un cran. En 2023, la Commission européenne a proposé une autorisation renouvelée pour dix ans, mais l’unanimité n’a pas été au rendez-vous. Le Parlement européen s’est divisé, et la France, aux côtés de quelques voisins, a affiché sa réticence.

  • De nombreux scientifiques pointent le manque de recul sur les effets à long terme, tant pour la santé humaine que pour les écosystèmes.
  • Les défenseurs du glyphosate mettent en avant l’absence de solution aussi performante pour limiter les herbes indésirables, et l’impact sur les coûts agricoles.

Dans la société, la demande d’une transition vers l’agro-écologie enfle. Moins de chimie, plus de diversité, plus de précaution. Mais le débat s’enlise dans les contradictions : incertitudes sur les études, jeux d’influence des lobbies, attentes élevées pour une agriculture repensée. Le glyphosate reste au cœur de cette bataille, symbole d’un modèle agricole en quête de nouveau souffle.

Ce que dit la réglementation française aujourd’hui

En France, l’encadrement de l’usage du glyphosate s’est durci, mais le couperet n’est pas tombé pour tout le monde. Depuis 2017, la promesse présidentielle d’un abandon du glyphosate rythme les débats, sans se concrétiser pleinement. La mise sur le marché du Roundup et autres produits similaires dépend à présent d’une autorisation de l’Agence nationale de sécurité sanitaire (ANSES), accordée pour une période limitée, avec possibilité de renouvellement.

  • L’usage non professionnel du glyphosate est prohibé depuis 2019 pour les particuliers. Les rayons des jardineries se sont vidés de ces produits.
  • Les collectivités ne peuvent plus employer ces substances pour l’entretien des espaces publics, que ce soit sur la voirie, dans les parcs ou les forêts communales.

Seuls les agriculteurs peuvent encore y avoir recours, à condition de respecter un cadre très strict. Doses maximales, délais avant récolte, protection des riverains : la réglementation sur les produits phytosanitaires se resserre à chaque amendement, et les contrôles se multiplient.

Public Autorisation d’utilisation
Particuliers Non
Collectivités Non
Agriculteurs Oui, sous conditions

À l’heure actuelle, aucune loi n’interdit totalement le glyphosate à des fins agricoles, mais usage et modalités d’application sont sans cesse réajustés, sous l’œil vigilant des autorités sanitaires.

herbicide réglement

Quelles alternatives pour les agriculteurs et les particuliers ?

Face à la sortie progressive du glyphosate, le monde agricole s’empare du défi et explore d’autres pistes, plus respectueuses de l’environnement et de la santé. Les solutions n’ont rien de magique : elles relèvent souvent d’un retour aux fondamentaux ou d’une innovation patiente, loin des promesses de résultats instantanés.

  • Désherbage mécanique : Bineuses, herses, rotofils, la panoplie est variée. Beaucoup de maraîchers ou céréaliers y reviennent, conscients que cette méthode exige plus de temps, mais réduit la dépendance aux produits chimiques.
  • Techniques culturales simplifiées : Le semis direct sous couvert végétal, par exemple, permet de limiter l’érosion tout en freinant la croissance des adventices, et encourage la biodiversité des sols.
  • Paillage : Paille, tontes, broyats, ardoise ou pouzzolane : le paillage, qu’il soit organique ou minéral, étouffe les indésirables en bloquant la lumière, et s’inscrit dans une logique durable.

Pour les particuliers, des solutions accessibles existent :

  • Le désherbage thermique, à l’aide d’un brûleur à gaz, fonctionne bien sur les petites surfaces et ne laisse aucun résidu.
  • L’utilisation ponctuelle de vinaigre blanc, avec modération, peut rendre service, même si sa portée reste limitée face aux racines profondes.

L’agroécologie s’impose peu à peu comme boussole. Couverts végétaux, rotations diversifiées, associations de cultures : chaque ferme, chaque parcelle, chaque jardin construit sa réponse. Ici, le choix dépend du contexte, des contraintes du sol et du climat, mais l’expérimentation et l’échange d’expériences dessinent les contours de l’après-glyphosate.

Le Roundup n’est plus l’outil incontournable qu’il était. Sur les talus, dans les champs, et jusque dans l’opinion, la page tourne, non sans résistance. Mais le vent du changement souffle, et il bouscule plus qu’il ne rassure. Qui osera vraiment l’affronter, bidon vide à la main, au seuil d’une nouvelle saison ?